Ce fut un honneur et un privilège d’avoir pu rencontrer une personne comme Guy STALENQ, patriote dans éternel, qui su dés les premières heures de la période sombre de l’occupation savoir faire des choix et se battre pour notre pays.
Sa modestie, sa gentillesse et par dessus tout son devoir de mémoire restera pour nous l’exemple à suivre tout au long d’une vie.
Guy est né à Fréjus le 15 avril 1923, il est bûcheron quand la guerre éclate, il fait parti de la classe qui sera envoyé aux Chantiers de Jeunesses Français créés par le gouvernement de Vichy, au groupement de Cavaillon, dans le Vaucluse et ce jusqu’au printemps 1943.
L’occupation Italienne de la Zone Sud laisse place à l’occupation Allemande depuis novembre 1942. Alors que l'occupant soupçonnent des ambrions de résistance au sein de ces chantiers, Guy rentre à son domicile de Seillans, (var), convaincu de la trahison du gouvernement de Vichy.
Il décide d’entrer en action, en octobre 1943 il est recruté par l’intermédiaire de madame Schneider, Germaine JAFFARD et du lieutenant PIGAUT de Fayence au sein de la section Atterrissage et parachutage de la région Sud nommée R2, réseau « Fréderic » commandé par Camille RAYON, alias « Archiduc ». Guy STALENQ organise le recrutement sur son village de Seillans, et surtout la reconnaissance des montagnes au Nord, afin d’y localiser les lieux propices, futurs terrains de parachutages qui permettrons d’armer les groupes de résistants locaux et du centre et Haut Var Est.
Les ordres sont clairs, les équipes doivent êtres petites en quantité, mais grandes en qualité. Des hommes d’une confiance totale, bien souvent des amis, des proches de la famille, ayant la plupart du temps les mêmes affinités politiques avant guerre.
Sur Seillans à sa création en fin 42, début 43, l’équipe n’est composée que de 6 hommes seulement :
Guy, son père Louis, son frère Yvon, Jean SAURIN, Gabriel BLANC et François MARTEL. Puis, début 1944 viendra s’ajouter Fernand GASTALDI, et les frères LAMBERT, Marius et Jean Paul.
En 1944, la tension exercée par la gestapo la Milice et l'armée Allemande est tellement forte dans la région que Camille RAYON dois se faire oublier, PIGAULT lui aussi est obligé de changer de région. en Juillet, Justin BLANC , le chef S.A.P de Montauroux est arreté et mourra en déportation à Dachau. Même sort pour le commandant LAROUTE, puis l'instituteur de Callian Honoré BOURGUIGNON et l’abbé ALOÏSI de Bargemon tous deux déportés.
Par sécurité pour ses hommes, Guy STALENQ décide de ne plus rentrer à son domicile et de former un maquis. Naîtra ainsi sur le haut plateau au pied du mont Malay ce qui allait devenir un des plus efficace maquis du haut-Var pour la réception d’armes et le seul terrain pour reception d' agents Anglais, Américains, Canadiens ou Français, bientôt baptisé « Le camp Lafayette.. »
Au total se ne sera pas moins de 15 parachutages.
Guy STALENQ prend le commandement du terrain « Prisonnier » à partir de Mars 1944, reconnu par Londres et Alger sous le code AC184.
Il recevra début juin une mission de ravitaillement ainsi que 3 missions Franco/Américaines venues d’Afrique du Nord, une première équipe est parachutée le 03 août sous le commandement du capitaine américain Mills BRANDES. Mission "Ruth" forte de 15 hommes, elle va entraîner ce maquis et se battre à ses cotés, l’équipe sera ensuite confiée à Jean Paul LAMBERT et René CHAFFARD qui les conduirons à pied jusqu’à Barrème, (Basses Alpes) entrer en contact avec le Capitaine Prince et le Maquis de Mèle en attendant la prise de contact avec la Task-Force BUTLER et livrer les combats de libération.
Puis aura lieu la mission « Sampan », nuit du 11 au 12 aout 1944, le parachutage de l’officier de marine Français ALLAIN, alias « Lougre » et de l’officier OSS Geoffrey JONES qui se mettrons en contact avec le commandant BLANC dans la région des Arcs/ Trans en Provence et La Motte pour organiser l’opération aéroportée « Rugby ».
Et enfin la mission « Spectre », soir du 13 août, parachutage d’officiers Français, et Américains pour former la résistance locale et être prêts à entrer en action le moment venu, ils combattrons les jours de libération sur le secteur de Fayence, menant des guérillas et des attaques, ainsi que la demande de capitulation de la garnison Allemande de Fayence aidés des parachutistes égarés du 517em régiment.
Parler de Guy STALENQ n’est pas chose facile, car la modestie de ces hommes de l'ombre faisait qu’il ne parlait que très peu de lui. Le plus simple et donc de l’écouter parler, voici le récit qu'il nous confia de cette vie au Maquis écrit une nuit de pleine lune dans le vent froid glacé du plateau de Canjuers . Vous qui lirez ce texte n’oubliez jamais le sacrifice de ces hommes pour que nous, nouvelles générations, puissions vivre libre et en paix .
"J’ai 20 ans, nous sommes en 1944, le camp, bien dissimulé dans les rochers et sous les arbres, nous abrite depuis des mois et des mois. Le temps nous parait long, très long, car nous devons vivre cachés.
Mais nous tenons bon car l’amour de la liberté nous porte !
Notre principale occupation consiste à préparer les terrains de parachutage pour recevoir les armes de nos amis. Je suis chargé du terrain dénommé : AC184-Prisonnier ». Le balisage doit être fait très vite lorsqu’on entend dans le ciel noir le vrombissement des appareils, car il y aurait danger de mort à nous faire repérer par l’ennemi.
Ensuite, nous dégraissons les armes et nous les remontons avant de les transporter dans des caches où d’autres groupes de maquisards sauront les trouver et s’approvisionner à leur tour.
Chaque soir, à tour de rôle, je monte la garde pendant toute la nuit, seul sur un rocher d’où l’on peut entendre le moindre bruit, le plus léger frôlement, d’où l’on peu discerner, comme les chats qui voient la nuit, le plus discret mouvement des ombres.
Cette protection du sommeil de nos camarades est primordiale. Mais parfois, c’est si dur de lutter contre le froid glacé de l’hiver, d’écarter tout assoupissement, de se protéger contre la pluie drue qui tombe au printemps.
Et puis la faim qui nous tord souvent les boyaux car les convois qui nous montent les vivres depuis Mons ou Brovès sont incertains parce que périlleux.
Alors, pour lutter contre tout cela nous nous rappelons ceux d’entre nous qui sont descendus un jour et ne sont plus remontés parce que les nazis les ont capturés, torturés, et finalement fusillés.
Nous serrons nos dents et nos poings, notre cœur bat plus fort, déterminés à résister d’avantage encore pour venger nos camarades, pour mettre un terme à cette oppression, pour restaurer cette liberté qu’on veux nous arracher.
Il est des soirs d’une extraordinaire puissance : nous percevons, en bas, dans la plaine, chargée de senteurs, dans les villages obscurcis blottis contre les coteaux à l’abri de leur clochers, dans les villes muettes mais foisonnantes d’actions courageuses, dans les bastides et les mas où nos vieux, nos mères et nos sœurs travaillent pour rentrer les récoltes et entretenir le bétail, nous percevons les battements du cœur immense de notre terre mère , La Provence !
Elle qui est faite de générosité, de gaieté dans le travail, de soleil et d’amour, nous savons qu’elle ne se résigne ni à l’occupation, ni encore moins à la servitude.
Nous entendons s’élever vers nous sa détermination et son appel. Nous sommes là, sous les étoiles qui disent l’heure à nos bergers et soudain ces étoiles deviennent pour nous autant de points lumineux d’espoir, autant de guides vers la liberté. Nous nous sentons alors investis d’une extraordinaire mission et tels des chevaliers du monde du silence nous sommes prêts sans le savoir au sacrifice suprême pour que tout ce peuple retrouve son sourire et sa joie de vivre.
L’aube frémit bientôt derrière le Pésou, un coin de ciel s’éclaircit à l’Ouest, c’est le mistral qui va se lever…
Depuis de longs mois, nous sommes sur ces hauts plateaux de Canjuers, sur le Malay, paysage lunaire, sans végétation, balayé par les vents du Nord, avec au sol des pierres ciselées par le gel.
Tout est maintenant plus clair ! Notre foi et notre volonté, malgré, ou à cause de nos 20 ans, sont sans faille, parce que nous ne sommes plus seuls…
De plus, depuis quelques jours, le parachutage d’un commando des forces alliées, fort de 15 hommes, sous le commandement du Capitaine BRANDES est venu se joindre à nous.
Cela nous a donné un formidable coup de fouet au cœur, d’abord, mais aussi au « Palais » qui avait perdu le gout du chocolat, des chewing-gums et des cigarettes.
Aussi, dans l’enthousiasme et pour rendre hommage à ces soldats venus de l’au-delà des mers, nous avons décidé de baptiser notre Maquis , « Camp LAFAYETTE »
Il ne nous manquait plus qu’un fanion… Alors, avec des pans de parachutes prestement portés au village voisin, nos sœurs, nos fiancées, toutes ces jeunes filles qui nous attendaient impatientes confectionnèrent ‘L’emblème de la Liberté ».
Combien sont-elles à connaitre notre secret ?,
Combien sont-elles à avoir cousu et brodé notre fanion ?
Nous ne le saurons jamais !!
Mais ce que nous savons, c’est qu’elles ont eu confiance en nous, et qu’elles l’ont fait avec tout leur amour, avec foi, avec courage, avec une détermination comparable à la notre.
Elles nous ont appris que la Liberté ne se gagne pas seulement par les armes. Pour triompher, c’est un élan unanime qui doit la porter."
Guy STALENQ , et ses frères les Maquisards du Malay,
Vous trouverez ci-dessous un rapport de mission envoyé à Alger par messages codé de Guy STALENQ, sur terrain « Prisonnier » répondu dans le formulaire type du réseau R2 d’Archiduc :
BBC Message ? : "The salute is indeed military / The engravings are indeed archives"
reception message date ? : June 15th
Name code of the LZ ? : Prisoner
Time setting up your team ? : 10:40 p.m.
Type of markup ? : wood fire
Aircraft altitude ? : 400 meters approx
How long after the flight did the plane dropped ? : 10 minutes
How many parachutes does he dropped at each circles ? : 10 out of 3 circles
Did the material fall on the designated Drop Zone ? : 25 parachutes inside / 5 outside of about 400m.
Number of containers found? : All, 15 containers / 15 packages
Did the parachutes open ? : 29 open / 1 crashed
How many containers with markings ? : 4 “CO” / 4 red triangles.
What to report for security ? : Nothing to report, land still usable.
Response from Algiers to the message:
For the next operation, planes not coming at the same time, leave your team until 4 o'clock in the morning. Kind regards. Signed: "R"
Message ? : « Le salut est bien militaire /
Les gravures sont bien des archives »
Emission du message ? : 15 juin
Nom du terrain ? : Prisonnier
Heure mise en place de votre équipe ? : 22h40
Type de balisage ? : feux de bois
Altitude de l’avion ? : 400 m
Combien de temps après survol l’avion a largué ? : 10 minutes
Combien de parachutes a-t-il largué à chaque passage ? : 10 sur 3 passages
Le matériel est-il tombé sur le terrain ? : 25 parachutes dedans/ 5 dehors de environ 400m
Nombre de containers retrouvés ? : tous, soit 15 containers /15 paquets
Les parachutes se sont-ils ouverts ? : 29 ouverts/1 écrasé
Combien de containers portant des marquages ? : 4« CO » / 4 triangles rouges.
Qui a-t-il a signaler niveau sécurité ? : Rien a signaler, terrain toujours utilisable.
Réponse d’Alger au message :
Pour prochaine opération, les avions ne venants pas en même temps, laissez votre équipe jusqu’à 04 heures du matin. Amicalement. Signé : « R »
Guy STALENQ sera décoré de la croix de combattant volontaire de la résistance et L’abbé ALOISI, le proposera pour la croix de guerre, avec citation à l’ordre de la Brigade :
Patriote ardent et généreux, volontaire de la première heure, à participé à toutes les opérations de son groupe depuis sa création jusqu’aux dernières actions de la libération locale. A toujours fait preuve de sang froid, d’abnégation et de discipline. Après son temps dans le maquis, à poursuivi son action patriotique en s’engageant dans l’armée régulière à la BA108 dés que les opérations locales furent terminées.
Signé : Capitaine J.P ALOÏSI. Aups 1946.
Guy sera un des premiers defenseurs de la mémoire de ceux du Maquis, un monument sera erigé sur le clos d'Espargon au pied du Malay, dans le grand plan de Canjuers, aujourd'hui terrain militaire. il fera don et remettra au commandant du camp le fanion original du Camp Lafayette qui depuis est exposé dans la salle d'honneur du camp, et qui est chaque année au mois d'Octobre sorti et porté à la commémoration hommage à ses hommes qui se sont battus pour la liberté.
C'est grâce à ce devoir de mémoire que nos chemins se soient croisés, votre sacrifice ne sera jamais oublié Guy. Merci également à son épouse et sa famille pour les photos et documents et textes qui sont et restent documents privés à reproduction interdite sans autorisation